Interview
Moustaph Djitteye, syndicaliste : « Nous connaissons la santé financière de notre pays, c'est pourquoi nous revendiquons »
Quelques jours après la suspension du mot d'ordre de grève de l'Union nationale des travailleurs du Mali, suite à l'éviction du président de la transition Bah N'daw et son premier ministre Moctar Ouane, le secrétaire général du syndicat national de l'éducation et de la culture, syndicat affilié à l'UNTM, nous a accordé une interview au siège national de la centrale syndicale à Bamako coura. L'occasion pour Moustaph Djitteye de mettre le curseur sur les causes de ladite grève, ses impacts socio-économiques et surtout la position « intact » des syndicalistes quant aux éventuelles négociations. Entretien.
Yelihebdo : Pouvez-vous présenter brièvement votre centrale à nos lecteurs ?
Moustaph Djitteye : l'Union nationale des travailleurs du Mali est la plus grande centrale syndicale au Mali. Elle a été créée en 1963 dans le cadre de la satisfaction des doléances des travailleurs. A travers 13 syndicats nationaux qui sont réunis en son sein, l'UNTM a des démembrements jusqu'au niveau des villages. C'est en quelque sorte la base pyramidale des syndicats.
Quels peuvent être les impacts socio-économiques des arrêts de travail de votre centrale syndicale ?
De la douane aux impôts en passant par les banques et les mairies, nous contrôlons tous les maillons essentiels de l'économie nationale. Une seule journée de grève de l'UNTM coûte au minimum 11 milliards de FCFA. Notre arrêt de travail freine l'économie et suscite des embrasements sociaux. Voyez-vous, quand tous les services sont fermés y compris les administrations publiques et banques, le train de vie devient difficile. Aucun syndicat n'a intérêt d'aller en grève. Mais malheureusement cet arrêt de travail était notre dernière cartouche.
Des citoyens pensent que la période de transition est une période "critique" pensant qu'elle n'est pas propice pour votre grève...
Il n'y a pas de période propice pour aller en grève. Nous réclamons tout simplement l'application d'une loi. Si vous regardez dans l'histoire, il y a eu des revendications même dans des pays en guerre pendant la première et la deuxième guerres mondiales. Et ce n'est pas la première fois pour l'UNTM, nous avions observé 72 h de grève en 2014. Heureusement les autorités de l'époque avait aussitôt compris. Ils ont initié les dialogues sociales en vue d'y mettre fin. Ce n'est donc pas qu'on est dans une période difficile qu'on ne doit pas revendiquer !
Au moment où le débat autour de "l'article 39" resurgit dans l'opinion publique, pensez-vous que l'État a les moyens nécessaires pour concrétiser ces engagements ?
Qui traite les salaires des fonctionnaires et des cadres, les salaires du président de la République et des ministres ? Ce sont nos militants qui y sont à la base. Nous connaissances la santé financière de notre pays, c'est pourquoi nous revendiquons.
Qu'est-ce qui n'a vraiment pas marché avec les autorités déchus de la transition ?
Si les autorités de la transition nous avait écouté on n'en serait pas là aujourd'hui. Au moment où au moins 6 points, qui devaient être appliqués au mois de mars, sont sur la table et une grève, à la limite illimitée, est en cours, le président de la transition prend son vol pour aller à Paris. En pleine négociation, nous ne pouvons pas comprendre une telle méprise.
Etes-vous prêts à lancer un nouveau mot d'ordre de grève si des "interlocuteurs fiables", notamment un nouveau gouvernement, se mettaient en place ?
Évidemment ! Nous ne faisons la promotion de personne. Nous demandons seulement l'application d'une loi. Pas plus, pas moins.
Un mot de la fin..
Nous invitons les autorités de la transition à reconsidérer la feuille de route de la transition, respecter les engagements prises. Sinon le match reprendra à zéro.
Propos recueillis par Khaled Mohamed
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