Crise politique
Marche du 5 juin : L’ultimatum, une denrée périssable ?
Vendredi 5 juin, le boulevard de l’indépendance de Bamako était envahi par une immense foule. Curseur sur une grande mobilisation organisée par l’Espoir Mali Koura (EMK), la Coordination des Mouvements, Associations et Sympathisants de l’imam Mahmoud Dicko (CMAS) et le Front pour la Sauvegarde de la démocratie (FSD, de l’opposition politique). En plus de la kyrielle de griefs, formulé à l’encontre du pouvoir, un ultimatum assignant au président de la république sa démission urbi et torbi.
« Ce que vous lui (IBK) avez dit, est suffisant, mais je reviens là-dessus. Comme il n’aime pas l’ultimatum. Quand tu lui demandes de mettre fin à une situation, c’est pour qu’il la refasse le lendemain. Pour nous montrer qu’il s’en fout, mais je jure par Allah, s’il ose nous défier cette fois-ci, sa manière de laisser le pouvoir va rentrer dans l’histoire.», lance l’imam Mahmoud Dicko devant une impressionnante foule enthousiaste. Venus nombreux de différents quartiers de Bamako et des autres capitales régionales, les manifestants (dont nous ignorons, au moment où nous rédigeons cet article, le nombre exact) réclament la démission du président IBK. Avec le drapeau malien, des banderoles et des pancartes, beaucoup d’entre eux étaient déjà sur place depuis 11 h pour prier le vendredi sur place avant d’entamer la marche à l’après midi.
C’est vers 16 h que l’imam Mahmoud Dicko se dirige vers le pupitre. Comme les autres intervenants, qui ont pris la parole avant lui, l’imam n’a essentiellement qu’un seul message : la démission pure et simple du président IBK et la dissolution des autres institutions de la république. Les discours terminés, les organisateurs peuvent enfin lire une dernière déclaration dans laquelle ils lancent un ultimatum au chef de l’État. Ils l’appellent à démissionner avant 18 h GMT.
C’est déjà le crépuscule. Il pleut à la place de l’indépendance. Et plus l’obscurité s’approche, plus le nombre des manifestants dimunie. Cependant, une foule décidée à découdre ce jour même avec le « régime » se dirigea vers le domicile du chef de l’État à Sebeninkoro. Vœux pieux ! Elle sera dispersée par un imposant dispositif de sécurité érigé depuis Djikoroni pour faire échec à toute tentative de déferlement sur la résidence présidentielle. Du bras de fer qui en a résulté au cours de la nuit, il a été déploré du côté des forces de l’ordre neuf blessés et quelques véhicules vandalisées dont un calciné.
« Le peuple l’a exigé, le président les a ignoré. C’est au peuple d’assumer maintenant ! La lutte vient de commencer ! », peut-on lire sur la page Facebook de la CMAS vers 21 h, comme pour dire qu’ils sont prêts, comme ils avaient prévu bien avant la marche, de sortir vendredi prochain.
Tout est parti vite. La semaine dernière, un message du porte-parole de l’imam faisait le fracas dans les médias. Après l’annonce de Issa Kaou Djim de mobiliser les foules, une conférence de presse, animée par des représentants de l’espoir Mali Koura (EMK), de la coordination des mouvements, associations et sympathisants de l’imam Mahmoud Dicko (CMAS) et du front pour la sauvegarde de la démocratie (FSD, de l’opposition politique), fait disparaitre l’ombre de doute.
Depuis un certain temps, rien ne va plus entre l’ancien président du haut conseil islamique du Mali et le pouvoir. Tel « un éclaireur du peuple », termes utilisés par ses sympathisants, Mahmoud Dicko ne manque pas d’occasion pour critiquer « la mauvaise gestion de l’État ».
Le 5 avril 2019 des milliers de marcheurs, répondant à son appel, ont battu le pavé pour exiger, à l’époque, la démission du premier ministre Soumeylou Boubeye Maiga.
Fort de la démission du PM, le leader religieux va-t-il parvenir à faire partir du pouvoir le président de la république, ce « grand frère » pour qui il avait appelé à voter en 2013 ? Il faut dire que le « très respecté » a déjà juré. Il a désormais derrière lui une partie de la société civile et de l’opposition politique. Cela est-il suffisant pour venir à bout d’un système frisant l’indéboulonnable ? Le regard de la communauté internationale récusant toute velléité d’alternance outre que les urnes.
Yelihebdo
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